Interview avec Wilnick Piriou, responsable de l’Institut des Métiers de la Chaudronnerie et Tuyauterie Industrielle, AOSDTF – Les Compagnons du Devoir et du Tour de France.
par Monique Large, Pollenconsulting
Dans un monde industriel confronté à des enjeux multiples et croissants, le métier de la chaudronnerie doit se réinventer. Un programme prospectif innovant, accompagné en 2024 par l’agence PollenConsulting, a exploré les possibles visages de ce métier technique à l’horizon 2035, révélant de nouvelles perspectives d’évolutions. Autant d’opportunités à évaluer pour adapter les parcours de formation à ces profils émergents, en adéquation avec les besoins des entreprises et autres parties prenantes.
En se basant sur des méthodologies du Design Fiction, nous avons abouti à 10 possibles portraits de chaudronniers en 2035. Voici en bref : Aélia, 20 ans, jeune apprentie en distanciel – Emma, 45 ans, soudeuse en reconversion – Sandra, 55 ans cheffe d’équipe tuyauterie nucléaire – Nicolas, contrôleur qualité – Clémence, cheffe d’entreprise en chaudronnerie – Joseph, formateur en entreprise – Bayani, travailleur étranger – Kévin, chaudronnier freelance – Mimi, ingénieure multi-agence ou Noah, Chief happiness officer en chaudronnerie … Ces parcours fictifs ne sont pas des prédictions mais l’opportunité de discussion entre parties prenantes pour débattre des orientations souhaitables de la profession.
Qu’est-ce qui a motivé la mise en place de ce programme prospectif sur le métier de chaudronnier ?
C’est une démarche qui fait partie de notre mission en tant que collège des métiers, de faire de la veille technologique. Cela permet de faire évoluer les parcours de formations. Notre objectif c’est d’être en mesure de former les hommes de métiers à être autonome d’ici 4-5 ans et donc d’être opérationnel dans les environnements en évolution. Il faut donc avoir une vision claire du monde d’ici 4-5 ans. Nous avons procédé à un premier travail de prospective pour nous comprendre les contextes futurs du métier. Pour cette seconde édition nous nous sommes concentré sur l’humain, les hommes et femmes du métier et l’impact des changements sur parcours de vie professionnelle et personnelle.
Quelles sont les principales évolutions du métier de chaudronnier que ces portraits mettent en lumière ?
Ce qui ressort de cet exercice c’est la grande diversité des profils des chaudronniers, notamment les possibles reconversions vers ce métier, et ceci à tout âge, pour les hommes que pour les femmes. Parmi les enjeux clé, le besoin d’aligner la vie professionnelle et personnelle est particulièrement visible. Comment s’épanouir dans le travail, trouver du sens en tant qu’individu en collaboration avec les entreprises ? Dans notre métier, ceci peut se concrétiser dans les valeurs autour des nouvelles énergies, l’entrepreneuriat, l’autonomie ou la transmission intergénérationnelle.
Y a-t-il des compétences nouvelles ou des spécialisations qui ressortent de manière significative ?
Il y a des nouveaux métiers qui émergent, comme celui lié au bien-être de la personne. Des spécialisations autour de la maintenance, la qualité ou les nouvelles technologies durables sont également en évolution. D’une façon générale les chaudronniers seront plus mobiles, ce qui nécessitera plus d’autonomie, d’adaptabilité et la capacité à continuer à apprendre.
Quelles sont les principales actions envisagées pour adapter la formation professionnelle des futurs chaudronniers ?
Nous travaillons actuellement sur l’enjeux de décarbonation, notamment à travers un partenariat avec Junia, école des transitions située à Lille, qui met en relation des apprentis chaudronniers avec les élèves ingénieurs que ce soit en bâtiment, en mécanique ou architecture. Ces équipes travaillent ensemble sur des projets concrets et durables.
Comment comptez-vous améliorer l’image du métier de chaudronnier pour attirer de nouveaux talent ?
En poursuivant nos efforts de communication, en montrant les différents parcours possibles du métier, par l’exemple de l’excellence de la chaudronnerie mais aussi dans son expression au quotidien. Car peu importe où on va, il y a toujours de la chaudronnerie autour de nous, que ce soit en montant dans un train, dans le tube du rouge à lèvres, ou même dans le yaourt qui lors son élaboration est passé par des cuves et tuyauteries. C’est aussi de dire que l’entreprise en chaudronnerie est propre et mixte – loin des clichés – où les hommes et les femmes bénéficient de conditions de travail en constante amélioration.
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